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La pédagogie des opprimé.es, livre de Paulo Freire

Paru aux Éditions de la rue Dorion, ISBN 978-2-924834-10-7.

Citations

Page 205

«À travers la conquête et à toutes fins implicites de l'oppression, les oppresseurs s'efforcent de tuer chez les êtres humains leur aptitude à “voir” le monde. Comme ils ne peuvent y parvenir totalement, ils doivent le mythifier.

Voilà pourquoi les opresseurs développent toute une série de moyens qui leur permettent de proposer au “regard” des masses conquises et opprimées un monde faussé. Un monde chimérique qui, en les aliénant encore plus, les maintient dans la passivité. Ainsi, dans l'action de conquête, il est impossible de présenter le monde comme un problème: il est au contraire montré comme quelque chose de donné, de statique, auquel les êtres humains doivent s'ajuster.»


Page 209, 210

«Ce qui intéresse le pouvoir oppresseur, c'est d'affaiblir les opprimé.es plus qu'ils et qu'elles ne le sont déjà, en les isolant, en créant et en augmentant les scissions entre eux et elles, par une gamme variée de méthodes et de procédés.

Des méthodes répressives de la bureaucratisation étatique, à son service, aux modes d'action culturelle par lesquels ils manipulent les masses populaires, ce pouvoir dominateur leur donne l'impression qu'il les aide.

L'une des caractéristiques de ces modes d'action, que les professionnels de l'éducation sérieux mais naifs, facilement influençables, ne perçoivent quasiment jamais, est l'accent mis sur la vision fragmentaire des problèmes et non sur leur vision globale, comme dimensions d'une totalité


Page 2015

«Dans la distribution de faveurs aux uns et de dureté aux autres. Tous ces exemples sont des façons de diviser pour maintenir “l'ordre” à leur avantage.

Ces modes d'action s'appuient, de près ou de loin, sur l'un des pionts faibles des opprimé.es: leur manque de confiance vitale qui est déjà, pour sa part, le fruit de la réalité oppressive qui les façonne.

Du fait de leur dualité d'êtres “hébergeant” l'oppresseur, les êtres opprimés manquent de confiance en eux. D'un coté, ils cherchent à lui résister; de l'autre, ils sont attirés par lui à un moment de la confrontation, ce qui facilite la tactique de division du pouvoir oppresseur et lui permet d'obtenir facilement des résultats positifs.»


Page 217

«Dans cette action qui divise, nous retrouvons une certaine connotation messianique, à travers laquelle les dominateurs veulent apparaître en sauveurs des êtres qu'ils déshumanisent.

Au fond pourtant, le messianisme que renferme leur action ne peut cacher leur réelle intention. Ce qu'ils veulent, c'est se sauver eux-mêmes. Et sauver leur richesse, leur pouvoir, leur mode de vie, par lesquels ils écrasent les autres.»