En attendant le vouvoiement
https://www.ledevoir.com/opinion/chroniques/875485/chronique-attendant-vouvoiement
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Les professeurs manquent. Les bibliothèques sont misérables. Pendant ce temps, le débat public s’égare. L’attention est canalisée sur les toilettes genrées, les signes religieux et, désormais, sur le vouvoiement dans les établissements. C’est consternant.
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Quelque 6,7 milliards de dollars ont été disséminés en chèques-cadeaux, sous le couvert des élections, tandis que des projets collectifs étouffaient. Le transport collectif ? Il continue de faire défaut, autant que les logements sociaux et les hôpitaux. Le coup de circuit promis avec Northvolt n’était qu’un court-circuit. Plus d’un milliard de dollars sont partis en fumée avec la SAAQ, dans un projet dont était responsable un ministre au curriculum vitæ aussi mince que ses explications. Que dire du troisième lien ? Malgré l’absence de la moindre étude probante, on vient d’accorder 46 millions à un consortium privé pour relancer ce mirage, en même temps qu’on sabre le travail de fonctionnaires voués à défendre les services publics et qu’on menace les droits des syndiqués. Soit dit en passant, l’État a trouvé les moyens de financer la visite d’équipes de hockey professionnelles ou de golfeurs multimillionnaires. Pour excuser ce si malheureux tableau, les immigrants sont montrés du doigt, comme s’ils étaient la peste et le choléra.
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“L’air est plein de nos cris. Mais l’habitude est une grande sourdine”, écrivait Beckett.
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Cette pièce, Beckett l’a écrite après l’horreur de Hiroshima et de Nagasaki. C’était avant que le Canada n’aide l’Inde et le Pakistan à développer leurs armes nucléaires, en leur fournissant des réacteurs et un savoir-faire. Les deux pays s’affrontent aujourd’hui. Comment s’étonner que, dans un monde qui porte l’enfer aux nues, nous éprouvions tous de plus en plus de difficulté à nous projeter vers l’avenir ?
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Partout, les infrastructures promises battent de l’aile ou s’effondrent, avant même d’avoir tenu leurs promesses. L’avenir lui-même apparaît en quelque sorte en déficit de planification, tandis que nous continuons, grenouilles résignées que nous sommes, à barboter dans l’eau chaude. Peut-être le temps est-il venu d’agir, de briser la divine apathie, en fonction d’un destin collectif digne de ce nom.
VLADIMIR : Alors, on y va ?
ESTRAGON : Allons-y.
Ils ne bougent pas.
Rideau.»
Le Québec du milieu des années 2020, mais le problème c'est que nous ne sommes pas différents des autres pays du G-20… Nous expérimentons la chute!